Voici un dessin attribué à Alphonse Le Touzé de Longuemar, tiré de l'album « Pots-pourris, réminiscences et charges », récemment vendu aux enchères. Ce dessin aurait été réalisé vers 1850, sur la base des souvenirs de l'auteur : plus de vingt ans après sa participation à l'expédition d’Alger, il se remémore cette période et fixe sur le papier les portraits de nombreux soldats et de quelques marins rencontrés lors de la traversée à bord de l'Algésiras. Ce vaisseau de 74 canons, dont la construction avait été ordonnée en 1812, ne fut armé qu'en 1828 à Lorient ; il participa à la conquête de l'Algérie sous les ordres du capitaine de vaisseau François Ponée, entré dans la marine en avril 1790 en tant que volontaire.
Le caractère tardif de l'oeuvre peut ôter à celle-ci une certaine conformité à la réalité de 1830, mais le dessin est cependant très intéressant car il nous présente les coiffures qui étaient utilisées à l'époque par les officiers de vaisseau, effets conformes ou non aux textes réglementaires.
En premier lieu, nous remarquons le chapeau haut-de-forme qui depuis l'Empire remplace souvent le chapeau monté (bicorne) en petit uniforme. On se reportera au dessin d'un enseigne de vaisseau en 1819 par Goichon ci-dessous.
Mais notre attention se porte surtout sur les casquettes des deux autres officiers, 1er lieutenant (commandant en second) et 2e lieutenant de l'Algésiras, tous deux lieutenants de vaisseau.
Les premières casquettes apparurent réglementairement dans la marine en 1825, mais sur la tête des matelots, quartiers-maîtres et seconds maîtres. Elles avaient alors une forme particulière avec une visière et un couvre-nuque. Si de nombreuses représentations de matelots coiffés de cette casquette existent, aucune ne montre un officier avec cette coiffure assez disgracieuse. Ce n'est pas le cas de la casquette à simple visière qui paraît avoir été adoptée vers 1830, sans aucune prescription réglementaire jusqu'à l'ordonnance du 20 juillet 1837, à l'initiative d'officiers de vaisseau adoptant cette coiffure à la mer pour son caractère pratique.
Ces dessins attestent selon toute vraisemblance de cette adoption au plus tard en 1830. Ils ne sont néanmoins pas d'une grande précision. Ainsi, on ne retrouve pas la couleur alternativement bleu et rouge des morceaux composant le bandeau de la casquette des marins de base... Nous ignorons tout du processus de modification des casquettes d'origine : leur couvre-nuque ont-ils été enlevés par leurs propriétaires ou par un chapelier ? Un chapelier les a-t-il confectionnées ainsi ? Goichon a dessiné, longtemps après un lieutenant de vaisseau en petit uniforme vers 1830 avec une casquette du type de celle du 2e lieutenant de l'Algésiras, mais avec une coiffe blanche (voir ci-dessous).
En 1837, les casquettes des officiers prirent un aspect un peu plus proche de celui que nous lui connaissons aujourd'hui, alors que la casquette à double-visière disparaissait de la tête des marins au profit du chapeau "à la matelote" et du bonnet tricoté.
Ci-dessous figure une casquette de capitaine de corvette du modèle 1837 appartenant aux collection du Musée national de la Marine.
Le lecteur retrouvera des informations sur ces casquettes en 1830 à la fois sur notre premier ouvrage sur Les uniformes des officiers de la marine. 1830 - 1940 et sur le troisième sur Les marins français. 1789 - 1830. Etude du corps social et de ses uniformes, dont il reste des exemplaires disponibles.
Merci à notre confrère de La Sabretache Denis Brulé de nous avoir fait découvrir ces dessins de Le Touzé de Longuemar.
Amiral, merci pour ce post. Une question qui me turlupine après une remarque qui me fascine
la remarque tout d’abord : depuis que les marins ont des uniformes, ceux ci sont bases sur des elements communs.
la question maintenant : qui a »inventé » la casquette ? Nous ? Les anglais ?
:)
merci