Capitaine de vaisseau commandant le vaisseau Hercule de 1836 à 1837, Joseph Grégoire Casy assura l'instruction au mouillage et à la mer de François d'Orléans, Prince de Joinville, alors lieutenant de vaisseau. Cette charge l'obligea à l'excellence dans l'organisation de son bâtiment. Soutenu par le Prince, il proposa à la Marine un manuel d'organisation des vaisseaux qui fut publié en 1840, après examen par une commission qui en reconnut la valeur. L'ouvrage précisait les dispositions prévues par l'ordonnance du 31 octobre 1827 relative au service des officiers, des élèves et des maîtres à bord des bâtiments de l'État, lequel comportait encore de nombreuses zones d'ombre. Il ne prit pas valeur d'instruction validée formellement par le Département, mais pour autant le ministre de la Marine lui apporta sa caution en autorisant sa publication. Nous pouvons donc nous appuyer sur ce qu'il contient pour mieux décrire ce qu'était le service dans la Marine sous la Monarchie de Juillet.
En particulier, ce livre comporte deux planches sur les tenues portées alors par l'équipage, en leur attribuant des numéros, ce qui était novateur, et en citant les effets les constituant. Il est de ce point de vue d'un grand intérêt car l'uniforme au cours de cette période ne fait pas l'objet de longs développements dans les publications officielles que sont les Annales maritimes. Nous allons donc commenter ces planches et leurs descriptions qui évoquent les différents effets constitutifs.
Sur cette première planche, le paletot bleu du modèle adopté en 1825, avec ses pattes de col écarlates caractéristiques, est particulièrement mis en évidence, quand le collet n'est pas renversé. L'est aussi le "chapeau de paille couvert d'une toile noircie et cirée, garni d'un ruban timbré au nom du bâtiment". Voilà qui est intéressant, car nous pensions que le Prince de Joinville avait innové lors du retour des cendres de l'Empereur en donnant à ses marins un ruban légendé. Or, ce retour eut lieu en décembre 1840, soit quelques mois après la publication du livre du contre-amiral Casy. Cet ouvrage inspira-t-il le Prince, ou au contraire le Prince, lors de ses échanges avec son commandant à bord de l'Hercule, lui sussura-t-il cette idée que Casy s'empressa de vouloir faire valider par le Département ? Nous ne le saurons sans doute jamais, mais l'ouvrage de Casy est le premier de nature semi-officielle à évoquer le ruban légendé.
Nous y voyons également la "chemise blanche à col à liserés et à poignets bleus, portant sur la poitrine quatre attaches, en cordonnet blanc – les liettes –, destinées à saisir la cravate". Ce col était plus petit que celui qui s'imposerait au cours du Second Empire.
Cette seconde planche est plutôt consacrée aux tenues de travail. Y sont présentés la chemise en molleton bleu, la capote-caban et les effets gris, effets de fatigue, que nous pensions plutôt en toile rousse, comme ils sont spécifiés dans l'ordonnance du 1er mars 1832 et confirmés par la circulaire du 26 avril 1847... Ces effets de fatigue sont portés ou non sur le pantalon de drap et la chemise en molleton bleus, en fonction de la saison.
Nous remarquons enfin le bonnet de travail en tenue n°8, laquelle ne serait portée que la nuit. Ce bonnet est conforme à la description qu'en donne l'ordonnance du 1er mars 1832 : un bandeau rouge et quelques brins de laine au sommet qui préfigurait la houppette.
Le travail du contre-amiral Casy constitue bien la première tentative de codification de la tenue, avec des numéros comme cela paraît bien naturel aujourd'hui. Il faudrait attendre le 28 octobre 1910 pour qu'un arrêté ministériel reprenne officiellement une codification analogue, néanmoins plus complexe car attribuant des numéros à 12 tenues, ainsi qu'à 19 variantes (ajout ou remplacement d'effets particuliers).
Sur la tenue, comme sur bien d'autres sujets (service courant, mise en oeuvre de l'artillerie, manoeuvre des voiles), l'ouvrage "L'organisation du personnel d'un vaisseau" de cet officier général fit date.
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