Deux intéressants portraits de François-Paul de Brueys d'Aigalliers
- marine-maubec
- 1 avr.
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Sont en vente le 5 avril prochain deux portraits de François-Paul de Brueys d'Aigalliers.
Retraçons brièvement la carrière de ce marin né le 11 février 1753 et mort à Aboukir le 1er août 1798.
Sa vie maritime commença dès l'âge de 13 ans quand il embarqua comme volontaire sur le vaisseau le Protecteur. Deux ans plus tard, il fut admis comme garde de la marine.
Il fut promu lieutenant de vaisseau le 4 avril 1780 ; il naviguait alors sur Le Terrible, vaisseau de l'escadre de Guichen, puis passa sur le Zélé faisant partie de l'armée navale du vice-amiral de Grasse ; il participa ainsi à cinq batailles navales que livra la Marine royale en soutien des insurgés américains, dont le célèbre combat de la Chasepeake le 5 septembre 1781.
De 1784 à 1787, il reçut les commandements successifs des Chien-de-chasse, Coureur et Barbeau, bâtiments de taille modeste, aux Antilles.
En 1787, il fut désigné comme lieutenant de la garde de l'Amiral à Brest.
En 1790, on le retrouve à la 3e division, commandée par le capitaine de vaisseau chevalier de Villages, de la 6e escadre, puis commandant de la Poulette effectuant des missions au Levant et en Adriatique jusqu'en 1792.
Le 1er janvier de cette année, Brueys fut promu capitaine de vaisseau, sans passer par le grade de major de vaisseau, qui avait été supprimé en 1791. Il commanda alors le vaisseau Tricolore en Méditerranée, dans l'escadre de Truguet. Mais sa noblesse le conduisit à la destitution et à une arrestation en 1793. Sa réhabilitation intervint cependant en juin 1795 ; il fut alors promu chef de division.
Brueys devint contre-amiral en septembre 1796, puis vice-amiral en avril 1798. C'est alors qu'il reçut le commandement de l'armée navale de Méditerranée pour emmener en Egypte le corps expéditionnaire. On sait ce qu'il advint de cette armée navale lors du désastre d'Aboukir, alors que le général Bonaparte, commandant en chef de l'armée d'Italie, avait Brueys sous ses ordres en quelque sorte et en pensait le plus grand bien, écrivant au Directoire le 31 octobre 1797 : "Le contre-amiral Brueys est un officier distingué par ses connaissances autant que par la fermeté de son caractère. Un capitaine de son escadre ne se refuserait pas deux fois à l'exécution de ses signaux. Il a l'art et le don de se faire obéir."
Le premier portrait, sans doute le plus précieux, serait, d'après la maison de ventes, le seul ayant été réalisé du vivant de Brueys. Ce dernier nous est présenté par cette maison comme étant alors capitaine de vaisseau. Voyons si cette identification est bonne et si le millésime du tableau est cohérent avec les textes relatifs à l'uniforme.

Brueys est ici vêtu d'un habit bleu à coupe droite (pas de revers) à collet renversé rouge, passepoilé de blanc, recevant une broderie d'or, des boutons à l'ancre surmontée du bonnet phrygien sans l'exergue "REPUBLIQUE FRANÇAISE" (bouton en principe porté de 1792 à 1793 ; avec l'exergue, peut-être difficile à peindre, le port fut étendu jusqu'en l'an IV, 1795), des parements écarlates auxquels est adjointe une patte blanche, les deux étant brodés. L'absence d'épaulettes conduirait à penser qu'il n'est déjà plus officier supérieur, ni même chef de division, grade qui imposait le port de l'épaulette ornée d'une étoile.
Or l'habit des officiers généraux perd ses revers et retrouve une coupe droite le 10 pluviose an IV (30 janvier 1796), en conservant ses autres caractéristiques définies par l'arrêté du 26 prairial an II (14 juin 1794) : habit bleu, collet renversé écarlate, parements de drap écarlate avec pattes de drap blanc garnies de trois boutons.
Nous avançons donc l'hypothèse selon laquelle Brueys est ici représenté en contre-amiral peu après sa promotion à ce grade, avec des boutons qui n'ont pu être remplacés par ceux du modèle an IV (ancre simple avec l'exergue "MARINE MILITAIRE").
Le second portrait est plus courant, tout au moins plus connu, car il s'inspire très largement de celui détenu par le Musée National des châteaux de Versailles et Trianon (inv. MV5058, legs de la comtesse Brueys d'Aigalliers, veuve du modèle, en 1859). On y voit Brueys en vice-amiral

On relira avec intérêt le billet rédigé il y a plus de deux ans sur ce marin : https://www.marins-traditions.fr/post/l-amiral-brueys-d-aigalliers-lorsqu-il-était-jeune-officier-de-vaisseau
Voici encore deux représentations du vice-amiral Brueys qui n'ont pas la précision des portraits ci-dessus.
Sur les marins de cette période et leurs uniforme, nous nous référons naturellement à notre ouvrage Les marins français. 1789 – 1830. Étude du corps social et de ses uniformes.
Ces tableaux ont été adjugés le 1er 4 200 €, le second 5 500 €, hors frais.