Le détroit de Gibraltar a toujours été un enjeu important en temps de guerre. Au début de 1940, alors que l'Italie observait encore une certaine neutralité, les alliés avaient un grand intérêt à coordonner leurs actions pour verrouiller le détroit à leur profit. Cet objectif rendait nécessaire des discussions entre états-majors et des rencontres physiques entre les grands chefs.
Voici quelques photographies prises le 17 mars 1940, aimablement communiquées par M. Bernard Ollive, petit-fils de l'amiral, de la rencontre entre Esteva et Ollive, côté français, et North, côté britannique.
Sur le cliché ci-dessous, au premier rang de gauche à droite se trouvent le rear-admiral Watkins, officier de liaison auprès de l'Al Esteva, l'amiral Esteva, l'admiral Sir D. North, le vice-amiral d'escadre Ollive, et le commander Mackintosh, officier de liaison auprès du VAE Ollive. Au second rang, de gauche à droite se tiennent un commissaire britannique, secrétaire de la réunion, le lieutenant de vaisseau de Pitray, officier d'ordonnance d'Esteva, le captain Duke, chief of staff de North, le capitaine de frégate de Bryas, officier de liaison français à Gibraltar, le lieutenant de vaisseau O'Neil, officier de liaison d'Ollive, et l'officier d'ordonnance de North.
L'amiral Esteva était alors commandant en chef pour la Méditerranée (PC à Toulon) ou "amiral Sud" ; le vice-amiral d'escadre Ollive était quant à lui commandant en chef des forces maritimes de l'Atlantique sud et d'Afrique (PC à Casablanca) ou "amiral Afrique" ; ils étaient donc tous deux concerné par Gibraltar. North était quant à lui vice-admiral Gibraltar et North Atlantic Station. La situation d'Esteva montre qu'à l'époque le préfet maritime n'était pas en même temps commandant de zone maritime, comme c'est le cas aujourd'hui.

Sur le plan de l'uniforme, ces photographies amènent les remarques suivantes.
On peut d'abord remarquer qu'à l'époque le port des rappels de décorations (barrettes) n'était pas systématique. Nombre d'amiraux se contentaient de porter à la boutonnière gauche la rosette seule ou "sur canapé", suivant le grade détenu dans l'Ordre de la Légion d'honneur. Rappelons que les rappels de décorations ne furent introduits dans la Marine que tardivement, le 21 mai 1917.
Le port des aiguillettes permet de facilement identifier les officiers d'ordonnance des amiraux, ou tout au moins les officiers de leurs états-majors. Notons que dans la Royal Navy, les aiguillettes se portent sur l'épaule gauche, et non droite.
L'amiral Esteva se distingue par le port d'une fourragère acquise à titre individuel ; il reçut deux citations à l'ordre de l'armée navale pendant la Grande Guerre.
Du côté des casquettes, coiffe blanche ou coiffe bleue sont portées simultanément. En ce mois de mars, l'amiral Esteva s'est sans doute conformé aux prescriptions valables pour la rive sud de la Méditerranée, tandis que le vice-amiral d'escadre Ollive à Casablanca suit sans doute les habitudes brestoises... Nous remarquons enfin les 4 ou 5 étoiles sur les casquettes, mesure récente car avant le 13 janvier 1940 il n'y en aurait eu que 3 pour ces deux officiers généraux en dépit des 4 ou 5 portées sur les manches.

Cette rencontre se déroula manifestement dans une ambiance détendue et amicale, les épouses des officiers britanniques se joignant aux deux délégations pour une réception.

On était encore bien loin du drame de Mers el-Kébir...
bonjour
autre commentaire : l'amiral esteva - si j'ai bien suivi - boutonne sa veste "à l'envers" - "comme les femmes". à l'origine, le double boutonnage permettait - et c'est pour cela je pense que les marins l'ont tous adopté - de couper le vent. on alternait le sens de boutonnage - avec des vêtements adaptés, pas comme maintenant, pour réduire l'usure.
voir : https://bit.ly/3R0Y2zh (amiral, vous me pardonnerez, je l'espère, cette stratégie du coucou :)
bonne journée