Un mécanicien principal de 2e classe sous le Second Empire
- marine-maubec
- 3 juin
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"Cherbourg par ses photographes" nous a communiqué cette photographie d'un officier de la marine dont le corps est facilement identifiable et à une époque aisée à déterminer.
Remarquons tout d'abord la nature des broderies au collet et aux parements : il s'agit d'une baguette étalinguée, caractéristique des officiers mécaniciens. Cette unique baguette signe le grade de mécanicien principal de 2e classe (assimilé à enseigne de vaisseau – il n'y avait qu'une seule classe à l'époque) ; elle devait être brodée sur du velours couleur lilas. Remarquons également que cet officier était décoré de la médaille militaire du type "Second Empire". Rien d'incongru, l'intéressé l'ayant reçu dans sa vie antérieure d'officier marinier. Il s'agit donc d'un officier mécanicien issu du rang, sans doute premier maître méritant, alors seule voie d'accès à ce corps d'officiers créé en 1860.

Revenons sur ce corps d'officiers de la Marine.
Alors que du personnel mécanicien servait à bord de bâtiments de guerre depuis plusieurs décennies (il étaient civils depuis l’ordonnance du 30 mai 1831, puis militaires depuis l’ordonnance du 24 mai 1840), le corps des officiers mécaniciens ne fut créé qu’en 1860 par le décret du 25 septembre. En 1845, l’ordonnance royale du 28 novembre avait pourtant posé le principe de la création d’un corps d’officiers spécialisés dans la navigation à vapeur avec le grade unique de mécanicien en chef, prenant rang entre l’enseigne et le lieutenant de vaisseau, mais cela ne s'était pas concrétisé.
Au cours des premières années qui suivirent la création du corps, la hiérarchie ne comprenait que trois grades qui correspondaient à trois types d’emploi :
Mécanicien en chef : emploi d’adjoint à un commandant supérieur de bâtiments à vapeur ou dans un port (2 postes créés à l’origine) ;
Mécanicien principal de 1ère classe : emploi à terre (8 postes créés) ;
Mécanicien principal de 2ème classe : emploi à terre ou à la mer (embarquement sur un bâtiment à vapeur portant la marque d’un officier général ou le guidon d’un chef de division, ou sur d’autres bâtiments à vapeur) (30 postes, nombre porté à 40 en 1867). Nombre de bâtiments à vapeur avaient donc pour chef mécanicien un premier maître. Rappelons que le programme naval de 1857 avait posé le principe que nul bâtiment ne pouvait être considéré "de guerre", plus exactement "de combat", s'il ne disposait pas d'une propulsion à vapeur, en plus de la propulsion vélique.
Notre officier était donc l'un de ces 30 à 40 officiers, dont une poignée était en service à Cherbourg, ce qui aurait pu faciliter son identification. Mais c'était sans compter sur le nombre important de médaillés militaires dans cette population (par exemple 24 sur 40 en 1870) largement issue des premiers maîtres et sur le fait qu'à cette époque les mécaniciens étaient répartis entre deux compagnies de dépôt au sein des divisions de Brest et de Toulon. Or les annuaires de la Marine ne donnent leur répartition qu'entre ces deux compagnies...
Pour les trois grades d'alors et ceux qui furent créés en 1889 et 1892, respectivement mécanicien inspecteur et mécanicien inspecteur général (assimilation comprise en le capitaine de vaisseau et le contre-amiral pour ce dernier), les distinctives furent remplacées en 1902. Les baguettes étalinguées or laissèrent alors la place à des feuilles d'olivier avec des rubans entourés d'un câble or sur du velours non plus lilas mais pensée, étoffe distinctive du corps jusqu'à sa fusion dans le corps des officiers de marine en 1966.
Voici ci-dessous les parements d'habit de mécanicien principal de 2e classe à gauche avant 1902 (la 1re classe avait deux rubans, chacun entouré d'un câble) et de mécanicien principal de 1re classe à droite après 1902.
Pour plus d'informations sur les officiers mécaniciens, qui deviendraient ingénieurs mécaniciens en 1929, puis ingénieurs de la marine en 1963, on pourra se reporter à l'article suivant : https://www.marins-traditions.fr/_files/ugd/c3f5ca_b7a94b74546b4a7b84238fbbc60f1d9e.pdf
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