top of page
Rechercher

Un service du Suffren interné à Alexandrie

marine-maubec

Le Suffren était un croiseur de 10 000 tonnes. Il faisait partie de la force X, cette escadre constituée en avril 1940 pour faire face aux actions de la marine italienne en Méditerranée orientale au cas où l'Italie entrerait en guerre aux côtés de l'Allemagne.

La force comprenait outre le Suffren le cuirassé Lorraine, les croiseurs de 10 000 tonnes Duquesne et Tourville, le croiseur de 7 500 tonnes Duguay-Trouin, les trois torpilleurs de 1 500 tonnes Basque, Forbin, Fortuné, et le sous-marin de 1 500 tonnes Protée. Soit 66 000 tonnes de bâtiments.

La force avait été placée sous le commandement du contre-amiral René-Émile Godfroy (promu vice-amiral le 19 juin 1940). Elle se trouvait à la fin du mois de juin au mouillage à Alexandrie. A la suite de l'armistice, l'amiral Andrew Cunningham avait reçu l'ordre de tenter de s'emparer des bâtiments français. De son côté, le 24 juin, Godfroy avait reçu l'ordre d'appareiller, mais Cunningham l'en dissuada pour éviter un bain de sang qui n'aurait profité qu'à l'ennemi. Ce dernier s'engagea à ne rien tenter contre l'escadre française en échange de quoi Godfroy promit de ne pas tenter d'appareiller. Le 3 juillet, jour de l'opération Catapult (saisie des bâtiments français mouillés dans les ports britanniques, drame de Mers el-Kébir), Cunningham avait reçu des ordres dont l'application brutale aurait conduit à un drame. Il ne les appliqua pas, espérant trouver un accord. Après bien des moments de tension et des doutes, le 7 juillet un accord fut effectivement signé par les deux amiraux (nous n'en reproduisons ici que les éléments essentiels) :

  1. Les navires français seront maintenus dans leur présent état (mazout débarqué, canons et torpilles rendus temporairement inopérants) en ce qui concerne le matériel ; ils ne seront pas sabordés ;

  2. Aucune tentative ne sera faite par les Britanniques pour les saisir par la force ;

  3. Le débarquement du personnel (à rapatrier vers la France) sera poursuivi jusqu'à ce que soit atteint le nombre d'hommes fixé d'un commun accord ;

  4. Le personnel restant n'entreprendra aucun acte hostile contre les Britanniques, et les navires n'essaieront pas de sortir du port ;

  5. Dans le cas où les bâtiments de guerre français seraient pris et utilisés par les Italiens ou les Allemands, le présent accord serait remis en discussion.

La force X séjourna à Alexandrie jusqu'en 1943, les bâtiments restant armés par des équipages réduits, certains officiers, comme Auboyneau ou d'Estienne d'Orves, ayant refusé l'inaction et décidé de rallier Londres.

La photographie ci-dessous nous présente un service du Suffren. On peut y observer en particulier des officiers mariniers vêtus de la chemisette spéciale pour pays très chauds dont les marques de grades (de poitrine) se distinguent de celles des officiers (d'épaule).

Un examen attentif du cliché permet également de remarquer que certains marins ne portent pas de marques de grade apparentes (difficulté de la confection à Alexandrie ?) et en plus dispose d'un écusson de casquette inhabituel.

Il faut ici rappeler que la convention d’armistice signée le 22 juin 1940 imposait la démobilisation partielle de la marine nationale. Il était donc nécessaire de réduire les effectifs des équipages de la flotte et des autres personnels sous statut militaire. L’Etat Français choisit, par une loi du 26 août suivant, de réduire les effectifs en supprimant certaines spécialités dont les personnels des équipages de la flotte furent rayés des contrôles de l’armée de mer : mécaniciens et arrimeurs d’aéronautique non volants, boulangers, commis aux vivres, cordonniers, cuisiniers, hydrographes, infirmiers, maîtres d’hôtel, mécaniciens de défense des côtes, personnel sédentaire des transmissions de la défense des côtes, secrétaires militaires, tailleurs et musiciens.

Il est vraisemblable que certains personnels, bien que maintenus à Alexandrie, virent leur statut modifié pour satisfaire aux conditions imposées par les Allemands, ce qui paraît bien étrange dans la mesure où ces derniers étaient bien loin... Toujours est-il que certains marins semblent avoir adopté l'insigne de casquette ovale imposé par l'instruction du 27 août 1940.

On retrouve ci-dessous un certain nombre d'officiers mariniers, tous en short, alors que celui-ci ne paraît pas avoir été réglementaire avant le 31 mars 1944 : une pratique qui précédait le règlement ? C'est étrange alors que la force X semble s'être conformée, au moins jusqu'en novembre 1942, aux prescriptions de Vichy.

Le 17 mai 1943, après des mois de négociations, le vice-amiral Godfroy décida enfin de rallier le pouvoir qui s'était établi à Alger. Les bâtiments légers rallièrent directement les ports d'Algérie, tandis que la Lorraine et les croiseurs firent le tour de l'Afrique, appareillant d'Alexandrie entre les 3 et 5 juillet et arrivant à Dakar le 18 août. Godfroy fut mis à la retraite d'office le 9 décembre 1943 après avoir été privé de son emploi dès son arrivée en Afrique occidentale française.

166 vues1 commentaire

Posts récents

Voir tout

1 comentario


vtc1
15 ene

Godfroy avait le choix de continuer le combat après l'armistice, comme Auboyneau, au besoin en faisant prendre à sa Force X le pavillon des FNFL. Au moins n'a t'il pas bêtement engagé ses forces dans un combat meurtrier, inutile et perdu d'avance. Il faut dire que ses équipages s'étaient fort bien battus au côté des Britanniques pendant un an, et que des amitiés solides s'étaient nouées d'un bateau à l'autre.

Pendant ce temps, à Mers El Khebir, c'était le drame, par manque de vision et de réflexion... D'autant que Darlan avait donné carte blanche au commandement par message, dans le but de préserver les bateaux et équipages. Un peu de patriotisme, supérieur à un serment au Maréchal, parfaitement illégal, aurait…

Me gusta
Post: Blog2 Post
  • Facebook

©2024 par éric schérer. Créé avec Wix.com

bottom of page