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Une casquette de vice-amiral membre du Conseil supérieur de la Marine du modèle 1928

Dans le catalogue d'une prochaine vente aux enchères figure cette casquette qui serait attribuée à l'amiral Darlan, du fait de l'indication figurant sur une étiquette ancienne et en cohérence avec la lettre D, toutes deux portées par le bandeau intérieur en cuir.

Analysons tout d'abord l'objet.

Il s'agit d'une casquette postérieure à 1928, puisqu'elle comporte l'écusson frontal. Ce dernier est du modèle réservé aux officiers généraux de marine (pas "de la marine"). Le bandeau de casquette est brodé du double rang de feuilles de chêne ; il comporte les trois étoiles du grade de vice-amiral. La broderie est surmontée d'une baguette à dents de scie sous laquelle se trouve une soutache en argent, ici "coincée" entre deux baguettes or, ce qui est fréquent, mais néanmoins non conforme ni au dessin qui figure dans l'arrêté ministériel du 22 janvier 1931, référence à quelques bémols près pendant la Deuxième Guerre mondiale, ni à celui que l'on trouve dans l'arrêté N°82 du 2 août 1957. Cette non conformité est relative à la présence d'une baguette or entre la dentelure et la soutache argent.

Cette soutache argent distingue depuis 1891 les vice-amiraux ministre ou membres du Conseil supérieur de la Marine.

Ces officiers généraux exerçant des responsabilités supérieures reçoivent à partir du 6 juin 1939 les rang et appellation de vice-amiral d'escadre ou d'amiral. Et ce n'est qu'à partir du 13 janvier 1940 que le bandeau de casquette des vice-amiraux d'escadre et des amiraux s'orne de quatre ou cinq étoiles.

Ici, la casquette n'en comporte que trois. Avec sa soutache argent, elle est attribuable à un vice-amiral membre du Conseil supérieur (chef d'état-major général, inspecteur général, préfet maritime, commandant d'escadre...) avant 1940.

Or l'étiquette à l'intérieur de la casquette conduirait à l'attribuer à l'amiral Darlan ; elle aurait été ramenée d'Alger par le chauffeur de l'amiral, sans doute bien après le débarquement des alliés en Afrique du Nord de novembre 1942 , sinon pourquoi cette étiquette qui paraît ancienne aurait-elle été rédigée en anglais ("A Cap Amiral Darlan Brought back from Algiers by the chauffeur Mollier") ?

Sauf que depuis janvier 1940 l'amiral Darlan porte cinq étoiles à sa casquette. Il est dès lors difficile d'imaginer pourquoi l'amiral serait allé en Afrique du Nord et y aurait laissé une casquette avec seulement trois étoiles (il avait droit à la soutache argent depuis 1936) que son chauffeur aurait rapportée d'Alger... Puisque l'étiquette mentionne l'Afrique du Nord, en anglais, donc plutôt 1942, s'il y a eu une casquette de Darlan à Alger, elle comportait assurément plutôt cinq étoiles.

Les deux photos ci-dessous montrent, à gauche en 1938, Vuillemin (avec cinq étoiles sur la casquette) et Darlan (avec trois seulement – c'était la norme dans la marine nationale, ce que l'intéressé au premier chef devait juger insupportable), alors qu'ils sont tout deux chefs d'état-major général, et à droite Darlan accueilli à Portsmouth le 20 décembre 1939 (toujours avec trois étoiles sur la casquette, mais cinq sur les manches – toujours la norme depuis 1931).

Nous n'avons donc aucune certitude sur l'appartenance de cette casquette. Celle-ci aurait pu appartenir à un autre vice-amiral exerçant des responsabilités supérieures dont le nom commence par un D. L'examen des annuaires de la Marine nous conduit aux vice-amiraux Docteur, Dubois, Drujon, Devin, Duplat, Decoux, en écartant les noms composés, qui ont été membres du Conseil supérieur de la Marine et ont donc eu droit à la soutache argent sur leur casquette entre 1928 et 1940.

L'énigme reste entière et la question se résume de la manière suivante : Darlan est-il allé en Algérie entre 1936 et début 1940 et y aurait-il oublié sa casquette ?

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1 Comment


marine-maubec
Oct 31, 2022

Manifestement mon argumentaire n'a pas été lu par l'acquéreur ou ne l'a pas convaincu. Cette casquette a été fort disputée et a été adjugée 5 700 euros ! Du jamais vu. Cela devient totalement déraisonnable pour un objet dont l'authenticité est discutable.

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