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Un aviso à roues sur le fleuve Sénégal vers 1870

Ces photos nous ont été communiquées par un confrère de la société d'histoire militaire La Sabretache que nous remercions. Elles nous montrent un bâtiment et une partie de l'équipage d'un des avisos de la station du Sénégal : l’Archimède, le Phaéton, le Basilic et l’Espadon. Les dimensions de ces bâtiments leur permettaient de remonter une partie du fleuve Sénégal. La France entretenait une présence au Sénégal depuis le XVIIe siècle, mais la colonie connut un essor considérable à partir de 1850.

Cette photo comporte plusieurs détails intéressants. Elle met notamment en évidence l'emploi de marins indigènes, les célèbres laptots du Sénégal dont il est intéressant de rappeler l'histoire avant la période de ce cliché.

La marine royale créa en 1765 le corps des laptots sur l’Île de Gorée ; « laptot » signifie « matelot » ou « mousse » en oualof. Il s’agissait du premier corps de soldats indigènes en Afrique. Un siècle plus tard fut créée à Saint-Louis du Sénégal, le 21 septembre 1864, une compagnie indigène de mécaniciens. Cette compagnie, composée d’un premier maître et d’un second maître mécaniciens européens, de 25 quartiers-maîtres mécaniciens (deux classes) et de 50 ouvriers chauffeurs indigènes (deux classes), était dédiée au service des bâtiments de la station locale et des ateliers de l’arsenal maritime de la colonie. Furent admis dans la compagnie de préférence les indigènes exerçant l’une des trois professions d’ajusteur, de forgeron et de chaudronnier. Il fallait naturellement être chauffeur avant de devenir quartier-maître mécanicien.

Observons précisément qu'il existe ici, debout un quartier-maître noir qui porte le paletot, lequel fut supprimé pour les quartiers-maîtres et matelots le 23 mars 1874, ce qui situerait la scène avant 1875. A la droite de ce quartier-maître sénégalais se trouve un second maître européen, coiffé d'un chapeau en feutre verni, dont les bords paraissent bien relevés, tout comme ceux de plusieurs marins, ce qui permettrait de dater le cliché avant 1873 (adoption du nouveau modèle de chapeau aux bords plats le 25 mars 1872).

On trouve également quelques marins coiffés par des bonnets quasi-informes, représentatifs des modèle 1858 ou 1870 – le modèle 1872 n'avait pas ce défaut.

Enfin, plusieurs marins sont coiffés du chapeau de paille, recouvert ou non (il porte alors un ruban légendé) d'une coiffe blanche. Mais nous ne pouvons rien en déduire, ni d'ailleurs de l'arme détenue par un indigène qui pourrait être un fusil double modèle 1850 de voltigeur corse, car assez long (1,22 m), qui équipa les tirailleurs sénégalais avant l'arrivée du fusil double modèle 1861 (1,085 m), les deux armes ayant pu rester parallèlement en dotation.

Voici potentiellement la photo du bâtiment sur lequel servaient ces marins, potentiellement car rien ne permet d'identifier cet aviso qui paraît avoir perdu au moins un de ses mâts, sans doute considéré inutile pour le service sur le fleuve. D'ailleurs, nombre d'avisos terminèrent leur vie comme caserne ou ponton au Sénégal, en droite ligne de cette transformation pour le service fluvial.

Cet équipage était commandé par un lieutenant de vaisseau. Est sans doute à ses côtés son officier en second, enseigne de vaisseau. Le zoom sur leurs casquettes ne permet pas d'y détecter la couronne impériale qui surmontait l'ancre de toque jusqu'au 10 octobre 1870.

Au bilan, une magnifique photographie représentative du service fluvial aux colonies, prise entre 1871 et 1873.



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