Un joli physionotrace colorisé vers 1804
- marine-maubec
- il y a 1 jour
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Dernière mise à jour : il y a 5 heures
Un collectionneur de miniatures nous a fait parvenir ce joli portrait de profil d'un officier d'administration en grand uniforme : collet écarlate, broderies blanches comportant une ancre et drap de fond d'un bleu d'une clarté inhabituelle, une couleur d'abord adoptée le 7 fructidor an VIII, sont des caractéristiques qui conduisent à cette identification possible. Pourtant, rien n'est sûr car il subsiste quelques incohérences.

En effet, d'après le décret du 7 prairial an XII, les officiers de l’administration de la Marine se distinguent toujours, depuis l'an VIII, en portant un habit de drap bleu ciel, en grand comme en petit uniforme. Leur habit de grand uniforme a ses collet et parements en drap écarlate. Il est coupé droit avec neuf gros boutons argent. Ce collet est droit, large de 7 à 8 centimètres ; celui adopté en l'an VIII était rabattu. Jusque là, la description est conforme. Mais quand on examine la planche du décret, les choses se gâtent, d'autant que le décret précise que les broderies des administrateurs de la Marine sont argent.

Or, les broderies paraissent ici blanches, couleur adoptée en l'an VIII, et pas du tout conformes aux dessins ci-dessus de l'an XII – nous n'avons pas trouvé le dessin de l'an VIII. Quant aux boutons à l'ancre, ils ne sont pas conformes pour leur motif qui s'apparente à celui adopté en l'an IV (ancre simple avec la légende "ADMINISTRATION DE LA MARINE") et paraissent en métal argenté, alors que cette couleur ne fut adoptée qu'en l'an XII...
Toutes ces informations, et bien d'autres, figurent dans notre ouvrage Les marins français. 1789 - 1830. Etude du corps social et de ses uniformes : https://www.marins-traditions.fr/les-marins-francais-1789-1830-etude-du-corps-social-et-de-ses-uniformes
Notre analyse conduit à une conclusion et à une hypothèse. D'abord que ces représentations ne sont que rarement exactes ; elles n'avaient pas vocation à rendre compte de la constitution de l'uniforme pour illustrer un règlement. Et qu'il est possible que ce physionotrace rende compte d'une transition de l'uniforme entre l'an VIII et l'an XII, ou juste après l'an XII. Ce commissaire ordinaire ou sous-commissaire – en l'absence de vue sur les parements, il est difficile de statuer –, peu argenté, aurait fait retoucher son habit de l'an VIII pour en transformer le collet, passant de la forme rabattue à la forme droite, et aurait fait changer ses boutons, en attendant des jours meilleurs lui permettant de remplacer les broderies de fil blanc par les broderies argent désormais réglementaires...
Valmont représente ci-dessous à gauche un commissaire ordinaire en grand uniforme de l'an XII (et un commis principal à droite, distingué par sa boutonnière brodée conforme au n°7 de la planche ci-dessus).

Si l'un de nos lecteurs a une autre idée sur ce physionotrace, qu'il la partage avec nous...
Idée alternative (bien sûr, en supposant toujours qu'il s'agit d'une représentation simplifiée de l'uniforme) : Pourrait-il s'agir d'un contrôleur (de 1re classe?) de la marine en uniforme selon le "Réglement pour déterminer l'Uniforme de l'Administration et du Contrôle de la marine" du 6 janvier 1818 (n° 13, pp. 105-108) ?
https://www.digitale-sammlungen.de/en/view/bsb10434474?page=168,169
"...boutons de métal argenté , timbrés d'une ancre cablée, couronnée et entourée de deux branches de lis ..."
"L'habit des offficiers du contrôle aura la même forme et les mêmes broderies et boutons que celui des officiers d'administration ; mais le fond sera piqué d'un seizième de blanc, et le collet et les paremens seront en drap écarlate"
Donc pas exactement l'habit "bleu de ciel" du Premier Empire, et…
Je ne comprends pas tout à fait cette critique.
"... ces représentations ne sont que rarement exactes ; elles n'avaient pas vocation à rendre compte de la constitution de l'uniforme pour illustrer un règlement. "
C'est exactement ainsi. Ces portraits n'ont pas été créés par des uniformologues, ce sont des souvenirs privés. Ce qui importe davantage n'est pas l'uniforme, mais la représentation la plus fidèle (du visage) de la personne. C'est l'essentiel. Et lorsqu'on représente l'uniforme, on se limite souvent aux éléments d'identification les plus importants, comme, par exemple, à l'élément le plus caractéristique du motif du bouton, ici l'ancre. Beaucoup d'autres portraits contemporains adoptent la même approche. Et à quoi bon distinguer le blanc de l'argent ? Comment représenter…